On oublie très souvent qu’au cours des premiers siècles, c’est par la liturgie des Apôtres que la doctrine et la foi chrétienne ont été fidèlement maintenues et transmises. La liturgie a été le premier moyen de conserver intacts et de diffuser les enseignements du Seigneur. Les textes du Nouveau Testament, et surtout les Épîtres, ne sont venues qu’après coup pour s’ajouter à la liturgie et faire avec elle un corpus rituel devant se maintenir au cours des siècles pour servir de référence à la théologie. 

Voilà pourquoi on a pu dire que la liturgie, en tant que “lex orandi”, c’est-à-dire en tant que règle de la prière publique de l’Eglise, était capable de transmettre de façon intacte le trésor de la Révélation divine qui constitue la “lex credendi”. Par conséquent, toucher aux règles de la liturgie, c’est porter atteinte à l’intégrité de la Révélation ; c’est ruiner la façon dont les fidèles peuvent - s’ils le désirent - avoir accès au contenu de la Révélation.

Ce qui se passe actuellement dans l’Eglise, où chaque célébrant croit pouvoir “adapter” la liturgie à telle ou telle communauté et où les traductions en langues courantes des textes liturgiques sont peu fiables, est d’une extrême gravité : on porte un coup mortel à cette liturgie qui est le moyen le plus sûr, le plus simple et le plus direct d’avoir un contact avec le donné de la Révélation.

La “lex orandi” reçue de la Tradition vivante n’est pas qu’un ensemble de règles et d’expressions figées qu’il faut répéter messe après messe, office après office. Non ! La “lex orandi” est d’abord un corpus entier de doctrine : c’est la traduction intacte de l’intelligence de la foi ; une traduction bien plus complète que celle que l’on peut trouver dans les textes magistériels et, de surcroit, plus accessible qu’un traité de théologie. Celui - prêtre, animateur liturgique, simple fidèle - qui ne comprend pas cela fera inévitablement fausse route et perdra son temps, son énergie et peut-être même sa foi en “animant” des assemblées où ne peuvent se retrouver que celles et ceux qui refuseront obstinément, au nom de la pastorale, de voir la vérité de la Révélation telle qu’elle est déposée dans les missels et exposée par la liturgie de l’Église.

Sans la foi authentiquement catholique qui permet de voir la liturgie comme une “épiphanie” capable d’ouvrir l’intelligence et la sensibilité à la transcendance de Dieu, tout discours sera stérile, toute entreprise pour re-dynamiser les paroisses sera vouée à l’échec, toute messe se voulant “participative” et “conviviale” éloignera les fidèles du Logos divin.

Une célébration faite au nom de l'Église ne peut parler aux fidèles que si, par sa mise en œuvre, elle demeure l’expression de la “lex credendi” et qu’à ce titre, elle ne soit plus la victime de cette dérive activiste qui fait le bonheur de ceux dont la conscience liturgique a été érodée au point de ne plus ni vouloir ni pouvoir participer à un avant-goût de la liturgie céleste.

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